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Remise en cause du concept d'efficience des marchés financiers

concept d'efficience des marchés

A) Une théorie difficilement applicable

Tout d'abord, tout ordre passé sur un marché financier donne lieu à des coûts de transaction ; cependant, d'après la définition de Jensen, cela n'empêche pas la réalisation d'un marché efficient, au contraire plus les coûts de transaction seraient élevés, plus les marchés seraient efficients. Il existe aussi certaines bourses de par le monde qui exigent un impôt de bourse.

Mais les conditions les plus improbables à exécuter sont celles relatives à l'information. Il est évidemment difficile de transmettre une information à tous les investisseurs au même moment ; malgré les progrès technologiques en matière de communication, les décalages temporels dans l'obtention des informations semblent inéluctables. De même, l'information doit être compréhensible pour tous dans le but d'être interprétée de la même façon par tous les agents : investisseurs professionnels et boursicoteurs amateurs n'ont certainement pas les mêmes capacités de compréhension face à des évènements très techniques. D'autant plus que le nombre d'individus plaçant leur épargne en Bourse sans avoir aucune connaissance financière de base ne cesse de croître, leur intéressement au marché n'est pas forcément régulier et ils peuvent donc aisément passer au travers d'informations. L'efficience des marchés est certainement plus probable lorsque ceux- ci ne sont constitués que d'investisseurs avertis.

Il paraît aussi utopique de penser que les investisseurs disposant d'énormément d'actifs (les fonds de pension par exemple) n'utilisent pas leurs simples agissements pour réaliser une plus-value ; pourquoi ne pas vendre massivement ses titres pour que leurs prix diminuent et les racheter aussitôt les cours suffisamment bas ?

La rationalité des agents peut également laisser planer quelques doutes, les investisseurs n'ayant pas forcément un comportement cohérent face aux informations et ce pour plusieurs raisons : le besoin de liquidité, la non-compréhension.

Les conditions nécessaires au bon fonctionnement des marchés financiers sont donc souvent difficiles à mettre en œuvre dans la réalité autant du point de vue du comportement des agents que de celui du processus lié à l'information.

B) Les mécanismes contrariant le principe d'efficience

Loin du concept d'efficience, il existe concrètement sur les marchés divers mécanismes ou effets qui viennent remettre en cause le fonctionnement théorique d'un marché.

On trouve ainsi le phénomène de mimétisme des agents économiques. Cela se manifeste par le fait qu'un agent suit les décisions d'autres agents pour prendre ses propres décisions. Pour Keynes, le mimétisme est d'abord un comportement rationnel. Il fait l'hypothèse que les agents économiques sont ignorants, qu'ils sont incapables d'interpréter les informations qu'ils reçoivent, ils ne peuvent donc anticiper le futur. Ainsi, il aura tout avantage à imiter les autres qui, eux, doivent savoir. Il est pourtant impossible de savoir s'ils savent réellement. Ce mécanisme remet en cause l'atomicité des agents puisque à présent l'action d'un seul agent, qui serait une référence pour les autres, aurait une très grande influence sur le marché. Les comportements des agents dépendent de moins en moins des valeurs économiques réelles (leurs besoins, leurs ressources) et de plus en plus des évolutions du marché (notamment l'évolution du prix d'une action).

Une autre grande défaillance du marché est l'autovalidation. On parle aussi d'anticipations autoréalisatrices, cela signifie que des anticipations d'agents économiques peuvent se concrétiser uniquement parce que ces agents pensent qu'elles sont justes, et cela qu'elles soient réellement justes ou non. Par exemple, si une majorité d'opérateurs du marché des changes pense que le dollar va s'apprécier dans le futur, donc qu'ils ont intérêt à en acheter aujourd'hui pour le revendre ultérieurement, leurs opérations d'achat vont mécaniquement valider leur croyance (le dollar va augmenter), que celle-ci soit économiquement fondée ou non. C'est l'enseignement fondamental de la théorie des « tâches solaires ». Une croyance faisait croire que si le soleil présentait de nombreuses tâches, alors les récoltes ne seraient pas bonnes. Ainsi, lorsque les paysans voyaient des tâches sur le soleil, plutôt que de produire beaucoup et de risquer des pertes, ils préféraient produire moins, d'où une diminution du volume des récoltes. Il n'y avait pourtant aucune incidence mesurable des tâches sur les récoltes, mais le résultat est là : s'il y a des tâches solaires, les récoltes diminuent.

Le price momentum est présent lorsque la performance (positive ou négative) des derniers mois a tendance à continuer pour les mois suivants, c'est-à-dire que les cours des actifs ne s'adaptent que lentement à l'arrivée de nouvelles informations, comme si les bons (mauvais) résultats des derniers mois engendraient de bonnes (mauvaises) nouvelles quelles que soient les informations intervenues. La réaction par rapport à l'information n'est donc pas instantanée mais s'étale dans le temps et l'utilisation des informations passées permet la réalisation d'un gain. Ce phénomène ne vient certainement pas de la lenteur de l'information mais de la confiance des investisseurs envers des titres ayant déjà prouvés leur performance. Le price momentum est semblable à la notion d'effet d'élan.

La surréaction est caractérisée par un excès d'optimisme (pessimisme), appelé surinterprétation, des investisseurs sur les perspectives d'une société, se traduisant par des achats de titres qui augmentent (diminuent) jusqu'à ce qu'ils se rendent compte que leur optimisme (pessimisme) était non fondé, donc ils vendent (achètent). Il s'ensuit ainsi des variations de prix qui ne sont pas le fait de nouvelles informations. La surréaction est une variation trop forte du prix d'un actif financier qui doit donc être compensé par la suite, en ce sens la volatilité des cours est accrue.

Un phénomène lié à la surinterprétation est la sous-réaction, signifiant que l'information est sous-estimée. Les investisseurs réagissent mais avec une intensité insuffisante par rapport à l'événement, entraînant un ajustement progressif dans les mois qui suivent. L'investisseur qui a réagit instantanément peut donc tirer parti de la hausse graduelle du cours des actifs.

Toutes ces tendances relèvent de faits observés sur les marchés financiers et tendent à rendre le marché moins efficace car il semble possible de bénéficier de profits en jouant sur les erreurs de marché. Cependant certains économistes prônent continuellement l'efficience des marchés et estiment ces phénomènes en adéquation avec l'efficience des marchés.

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